Dès lors qu'il fréquente ce qui est divin et ordonné, le philosophe devient donc ordonné et divin autant qu'il est possible à un homme de le devenir.
Platon, République, 500 c.
Peut-être le temps est-il venu de contester cette prétention qu’a le réel à régenter nos vies. Le réel, bien souvent, est laid et injuste. Ce qui nous attache à lui, c’est notre ego : nous entretenons avec le réel un grand nombre d’interactions qui déterminent l’image que nous nous faisons de nous-mêmes. Or l’âme se modèle sur ce qu’elle contemple, elle se nourrit des représentations qui lui sont offertes. Prendre le réel pour base de nos représentations intérieures, c’est par conséquent bâtir une version atrophiée et malingre de notre âme.
Je comprends bien les critiques que l’on a instinctivement tendance à formuler à l’encontre de l’idéal : « L’idéal n’est pas réel, c’est le pays des chimères ; c’est notre connexion avec le réel qui détermine la valeur de notre vie, y compris sur le plan moral ; le réel, tout imparfait qu’il soit, est notre seule dimension d’action et de réalisation ; l’idéalisme est une facilité, une fuite, un mensonge, sans la moindre portée, sans le moindre fruit. » J’entends tout cela. Je l’entends et je le conteste. Car en ce qui concerne l’influence des représentations sur nos vies, l’idéal me semble avoir une portée bien plus grande que le réel. Tout notre être tend vers l'idéal qui nous est propre, au point que notre personnalité, nos choix, nos disciplines et nos rituels quotidiens sont dictés par cet idéal, ou par l’absence de celui-ci. L’idéal transforme la vie, il génère des comportements inédits et inconcevables pour les autres, il repousse les limites établies et impose sa loi à la matière. Le réel est passif et inerte, l’idéal est libre et agissant. Oublions donc un peu le réel et forgeons-nous un bel idéal, ferme et durable, précis et cohérent. Après l’avoir forgé, contemplons-le, cultivons-le. Alors, comme si souvent dans l’histoire des hommes, les forces invisibles triompheront, le réel se soumettra à l’idéal et deviendra son humble reflet.
Peut-être le temps est-il venu de contester cette prétention qu’a le réel à régenter nos vies. Le réel, bien souvent, est laid et injuste. Ce qui nous attache à lui, c’est notre ego : nous entretenons avec le réel un grand nombre d’interactions qui déterminent l’image que nous nous faisons de nous-mêmes. Or l’âme se modèle sur ce qu’elle contemple, elle se nourrit des représentations qui lui sont offertes. Prendre le réel pour base de nos représentations intérieures, c’est par conséquent bâtir une version atrophiée et malingre de notre âme.
Je comprends bien les critiques que l’on a instinctivement tendance à formuler à l’encontre de l’idéal : « L’idéal n’est pas réel, c’est le pays des chimères ; c’est notre connexion avec le réel qui détermine la valeur de notre vie, y compris sur le plan moral ; le réel, tout imparfait qu’il soit, est notre seule dimension d’action et de réalisation ; l’idéalisme est une facilité, une fuite, un mensonge, sans la moindre portée, sans le moindre fruit. » J’entends tout cela. Je l’entends et je le conteste. Car en ce qui concerne l’influence des représentations sur nos vies, l’idéal me semble avoir une portée bien plus grande que le réel. Tout notre être tend vers l'idéal qui nous est propre, au point que notre personnalité, nos choix, nos disciplines et nos rituels quotidiens sont dictés par cet idéal, ou par l’absence de celui-ci. L’idéal transforme la vie, il génère des comportements inédits et inconcevables pour les autres, il repousse les limites établies et impose sa loi à la matière. Le réel est passif et inerte, l’idéal est libre et agissant. Oublions donc un peu le réel et forgeons-nous un bel idéal, ferme et durable, précis et cohérent. Après l’avoir forgé, contemplons-le, cultivons-le. Alors, comme si souvent dans l’histoire des hommes, les forces invisibles triompheront, le réel se soumettra à l’idéal et deviendra son humble reflet.
Ha, cher Laconique, vous revoilà ! En un peu plus court et ce n'est pas pour me déplaire, on y gagne en concision et vos idées, elles, quelle que soit la longueur de vos brillantissimes articles, ne le sont jamais, courtes ! D'ailleurs, à ce propos, ce n'est pas la première fois que je titille sur ce point l'être peu vaniteux que vous êtes, mais il me semble que des articles aussi lumineux et précieux mériteraient un écrin à leur juste mesure : oui, vous m'avez bien compris, cher Laconique, je pense que ce site devrait avoir droit à un bon relooking ou, du moins, que son esthétique nécessite un travail un peu plus approfondi. Un autre bandeau titre serait par exemple le bienvenu ! De même que l'ajout de quelques gadgets supplémentaires ne serait en rien superflu, comme celui permettant d'afficher une liste de vos plus récents articles, qui, à mon sens est indispensable ! Ainsi, peut-être accroîtrez-vous le nombre déjà exceptionnellement énorme de vos fans et lecteurs dont Le Marginal Magnifique fait partie !
RépondreSupprimerMais je m'égare un peu en vaines considérations... Pour en venir à ce qui fait le principal objet de ce commentaire, c'est à dire votre nouvelle publication, j'aime assez trouver cette citation de Platon en préambule, car en plus d'être très bonne et très juste, elle donne parfaitement le ton de l'article qui suit. Puis on vous y reconnaît parfaitement. Je préfère d'ailleurs que vous me parliez de Platon que de vos obsessions politiques, que, pour une fois, vous laissez côté. Au sujet de cette citation, un adepte du développement personnel parlerait d'"imitation" et dirait qu'il faut se mettre en contact avec les modèles qui présentent les caractéristiques que l'on souhaite acquérir. Et il y a même un adage populaire sur ce thème... Comme je l'ai déjà dit, il n'y a rien de plus juste ! Toutefois il faut reconnaître à Platon qu'il insuffle à cette pensée une bonne dose de noblesse non négligeable.
Venons-en maintenant au coeur du problème : d'après moi, la distinction que vous établissez entre "réel" et "idéal" reste compliquée à gérer tant ces deux choses sont inextricablement liées. Nous sommes avant tout des corps et on ne saurait faire abstraction du réel, tout simplement car il s'impose à nous quotidiennement.
Je suis d'accord avec vous lorsque vous affirmez que "le réel, bien souvent, est laid et injuste" contrairement à l'idéal. Tout cela est parfaitement noble et valable en théorie, mais face au monde, confronté à l'adversité qu'il met en branle, cela ne tient pas deux secondes. Rejeter le monde en faveur d'un idéal n'est pas tenable à moins d'être un pur esprit, un être éthéré comme il n'en existe pas encore.
Cependant, ce n'est pas tout à fait de cela que traite votre article, il serait injuste d'en faire le procès pour ces raisons, et un esprit moins fin que le mien pourrait s'y tromper : vous parlez de "représentations". C'est sur ce terrain-là qu'il faut envisager votre texte dont j'approuve alors le moindre mot. Lorsque l'idéal sert à modeler notre caractère et notre âme, il n'a plus rien d'irréel justement. Il a une influence directe sur nous et par conséquent sur le monde qui nous entoure, ce qu'exprime avec limpidité et la plus grande beauté votre conclusion. Je laisserais en revanche de côté "les forces invisibles", bien que poétiques, car il n'y a rien d'ésotérique là-dedans...
Je ne saurais assez vous remercier pour votre brillant commentaire, cher Marginal. Vous avez décelé toutes les subtilités de mon petit texte avec une sagacité à laquelle nul autre n’aurait pu prétendre. Il est vrai que le sujet était noble, et vous vous mouvez dans ces matières avec l’aisance et la prestance d’un albatros ! Je vais tâcher de répondre aux points que vous avez soulevés, bien conscient que, compte tenu de la richesse de la matière en présence, de nombreux aspects ne seront que survolés…
RépondreSupprimerJe vous remercie pour vos conseils d’ordre esthétique et technique. Vous être un expert en la matière, une référence absolue sur le net, et votre site superbe, à la fois dense et aéré, est un modèle indépassable. Pour ce qui me concerne, mon côté biblique (« Tu ne feras point d’image taillée, ni de représentation quelconque des choses qui sont en haut dans les cieux, qui sont en bas sur la terre, et qui sont dans les eaux plus bas que la terre ») me conduit à davantage de réserve en ce qui concerne la mise en forme. Je ne vise qu’à un seul critère : la clarté, quitte à être un peu austère. Cette page blanche sur fond bleu ciel me convient donc tout à fait pour l’instant. Mais vos remarques sont judicieuses, et je finirai bien par m’y mettre et par vaincre ma flemme en la matière. C’est vrai que le bandeau titre laisse un peu à désirer. La liste des derniers articles me semble aussi une très bonne idée, mais comme il y a cinq articles par page, les articles récents sont facilement accessibles. J’ai bien conscience que j’accroîtrais sans doute le nombre déjà considérable de mes lecteurs en procédant à ces ajustements, mais, si je ne craignais de froisser votre modestie légendaire, je vous dirais qu’un lecteur comme vous en vaut mille ! (Avouez que vous n’êtes pas venu pour rien…)
Moi aussi, je n’ai pu me défendre de penser au développement personnel, et au chantre charismatique et si convainquant de l’imitation de modèles : Tony Robbins, en écrivant cet article. Il y a quelque chose de rassurant et de stimulant dans le fait de constater que les thèses centrales du platonisme et de la psychologie moderne se rejoignent ainsi. C’est pourquoi, bien que moins expert que vous en la matière, j’essaie de me familiariser un peu avec cette branche des sciences humaines, qui promet de nombreux débouchés sur les plans les plus variés (et parfois les moins platoniques…).
Je vous rejoins tout à fait sur vos observations en ce qui concerne la primauté du réel. Effectivement, nous sommes avant tout des corps, et l’idéal ne peut se développer qu’à partir d’une réalité matérielle préexistante, et avec laquelle il faut toujours traiter. Je ne le nie pas, pas plus que Platon ne le niait d’ailleurs. Mais la philosophie, l’écrit en général me semble un sanctuaire à l’abri de « l’adversité », et dans mes articles j’ai tendance à atténuer un peu l’importance du réel par rapport à celle qu’il a dans la vie…
Oui, vous avez parfaitement compris, en expérimentateur rodé à toutes les techniques de contrôle du mental, qu’il s’agissait avant tout dans cet article de « représentations intérieures ». C’est bien cela que je désigne par le terme d’« idéal », et cela ne vous a pas échappé. Maintenant, est-ce qu’il suffit de « modeler notre caractère et notre âme » pour s’assurer une domination réelle sur son environnement, c’est une autre question, à laquelle je n’ai pas prétendu répondre. C’est en tout cas une bonne voie pour cela, à coup sûr, et rien de tel pour se forger de nobles et viriles représentations intérieures que de fréquenter assidûment « Le Marginal Magnifique » et « Le Goût des lettres » !