Quelle chose étonnante que le mouvement, que la vie ! Et pourtant tout le monde agit, pas un instant l’activité ne cesse, ne se suspend… Il serait peut-être bon de s’interroger sur la source de l’acte, afin de déterminer si celle-ci est pure ou coupable.
Il semble qu’il y ait deux sources distinctes capables de générer une action dans le monde. La première, c’est la causalité matérielle. L’individu recherche son agrément, fuit le déplaisir. L’immense majorité des actes qui nous entourent procède de cette source. Il faut reconnaître que les actes de ce genre, prévisibles et mécaniques comme la matière dont ils sont issus, ont quelque chose d’un peu lassant, d’un peu répétitif. Ceux qui s’y livrent (c’est-à-dire tout le monde) sont les prisonniers du grand jeu de la nature, ils cèdent à une impulsion, puis à une autre, et leur effort ne connaît ni trêve ni répit.
Existe-t-il une autre source à l’acte, une source pure, une source indépendante des déterminations extérieures ? Oui, et cette source, c’est le devoir. Le devoir est intangible, il ne flatte pas notre égoïsme, il se dresse devant nous comme un roc silencieux et austère. L’acte issu du devoir est pur, impersonnel, parfait, il ne laisse aucune trace derrière lui, ni regret, ni remords, ni nostalgie. La vie la plus heureuse, la moins douloureuse, ce sera donc, paradoxalement, celle qui sera vouée tout entière au devoir. Là, plus de place pour les maux, pour la malchance, pour les coups du sort : juste une ligne droite, que rien, jamais, ne viendra ébranler.
Quelle chance est la nôtre, en cette époque troublée, où les communications foisonnent, où les tentations nous assiègent, où l’éphémère règne, où la déliquescence s’accélère, de pouvoir disposer, toujours et partout, de cette boussole infaillible du devoir, qui annihile notre ego et libère nos actes de l’antique culpabilité qui pesait sur eux !
Il semble qu’il y ait deux sources distinctes capables de générer une action dans le monde. La première, c’est la causalité matérielle. L’individu recherche son agrément, fuit le déplaisir. L’immense majorité des actes qui nous entourent procède de cette source. Il faut reconnaître que les actes de ce genre, prévisibles et mécaniques comme la matière dont ils sont issus, ont quelque chose d’un peu lassant, d’un peu répétitif. Ceux qui s’y livrent (c’est-à-dire tout le monde) sont les prisonniers du grand jeu de la nature, ils cèdent à une impulsion, puis à une autre, et leur effort ne connaît ni trêve ni répit.
Existe-t-il une autre source à l’acte, une source pure, une source indépendante des déterminations extérieures ? Oui, et cette source, c’est le devoir. Le devoir est intangible, il ne flatte pas notre égoïsme, il se dresse devant nous comme un roc silencieux et austère. L’acte issu du devoir est pur, impersonnel, parfait, il ne laisse aucune trace derrière lui, ni regret, ni remords, ni nostalgie. La vie la plus heureuse, la moins douloureuse, ce sera donc, paradoxalement, celle qui sera vouée tout entière au devoir. Là, plus de place pour les maux, pour la malchance, pour les coups du sort : juste une ligne droite, que rien, jamais, ne viendra ébranler.
Quelle chance est la nôtre, en cette époque troublée, où les communications foisonnent, où les tentations nous assiègent, où l’éphémère règne, où la déliquescence s’accélère, de pouvoir disposer, toujours et partout, de cette boussole infaillible du devoir, qui annihile notre ego et libère nos actes de l’antique culpabilité qui pesait sur eux !
Ah cher Laconique ! Voyez, même en vacances et en inactivité Le Marginal Magnifique sent quand le puissant Laconique entre en action sur Le goût des lettres et ne peut rester insensible à sa puissance !
RépondreSupprimerJe ne vais cependant pas trop m'attarder, pour rester fidèle à mon principe d'éloignement maximal du net en cet période.
Votre article est propre, juste et me plaît beaucoup comme souvent : il est d'une concision et d'une rigueur implacable. Vous cernez bien, il me semble, les sources de l'"acte" et cette période estivale est encore plus propice à observer la première chez ces "prisonniers du grand jeu de la nature" qui "cèdent à une impulsion, puis à une autre" sans "trêve ni répit".
Pour la seconde, vous ne le dites pas, mais je suppose que c'est la vôtre, me trompé-je ? De même que c'est la mienne au fond. Toutefois, lorsque vous parlez de "devoir" vous ne vous embêtez pas, cher Laconique, vous nous jetez ce "devoir" en pâture et vous nous laissez nous dépatouiller avec ! Le terme est bien vague... J'aurais souhaité que vous précisiez, et vos innombrables lecteurs seront je pense du même avis, quel est ce devoir, cette "boussole" à laquelle nous, pauvres hères jetés en cette "époque troublée", pouvons nous raccrocher. J'avoue que j'ai bien ma petite idée : si vous ne le précisez pas c'est probablement que ce "devoir" est propre à chacun, il s'agit vraisemblablement de la façon noble avec laquelle nous devons assumer et porter notre destin, comme le fameux loup de Vigny dans ce poème dont je ne peux résister de citer les deniers vers :
"Si tu peux, fais que ton âme arrive,
A force de rester studieuse et pensive,
Jusqu'à ce haut degré de stoïque fierté
Où, naissant dans les bois, j'ai tout d'abord monté.
Gémir, pleurer, prier est également lâche.
Fais énergiquement ta longue et lourde tâche
Dans la voie où le Sort a voulu t'appeler,
Puis après, comme moi, souffre et meurs sans parler."
Ah, cher Laconique, puissions-nous être aussi courageux que ce pauvre et noble loup ! La tâche est ardue.
Cher Marginal, quel privilège vous me faites ! Le Marginal sort de sa retraite pour commenter mes petites divagations, je suis très flatté et reconnaissant. Comme bien d’autres j’imagine, je traque toutes vos interventions sur le net, sur votre légendaire site, ainsi que sur d’autres que la décence ne me permet pas de nommer ici (mais qui, par je ne sais quel mystère, m’ont fourni dernièrement un petit contingent de lecteurs), et c’est un plaisir de vous voir un peu plus expansif ici. Rassurez-vous, je ne vous solliciterai plus trop, car je vais moi-même m’éclipser du monde virtuel pendant un certain temps, et cet article sera le dernier jusqu’à, disons, la seconde partie du mois d’août. Ma destinée, moi aussi, m’appelle à glander un peu !
RépondreSupprimerMerci pour vos éloges, venant d’un connaisseur comme vous, je sais ce que c’est précieux. Oui, je ne me foule pas trop, je n’approfondis pas trop ce fameux « devoir », et cela n’a pas échappé à un œil sagace comme le vôtre. Mais vous avez trouvé la réponse de vous-même : le devoir est particulier à chaque situation, et il est difficile d’être plus précis en la matière. Disons que pour moi il s’agit surtout de faire face aux circonstances, de ne pas flancher, et de mourir plutôt au combat qu’en prenant ses jambes à son cou avec les sous-vêtements souillés par la peur… Comme l’a dit un poète du XXI ème siècle : « S’il faut crever je crèverai / Mais jamais je ne marcherai au pli. » D’ailleurs les fameux vers de Vigny que vous citez ne disent pas autre chose : « Fais énergiquement ta longue et lourde tâche, souffre et meurs sans parler », il n’y a rien à ajouter, et avec le buste d’Emmanuel Kant que j’ai mis au début tout ça forme un joli petit panorama sur le devoir. Il ne manque plus que la gueule de Sénèque !
Mais tout ça est un peu sérieux pour cette période estivale, regagnons vous et moi les zones de silence et de liberté où notre puissance peut se déployer à son aise, et donnons rendez-vous à nos innombrables lecteurs pour un peu plus tard, lorsque notre sagacité accrue nous permettra de remuer encore plus l’apathie de cette société amorphe et matérialiste.
Oui, la notion de devoir est très personnelle. Sans doute est-elle la quête de paix et de sérénité de chacun avec l'aspiration à cette sensation apaisante et aussi valorisante d'être en accord avec sa conscience. Mais la source de l'acte doit compter avec la complexité de la nature humaine et son environnement d'où toute la difficulté à trouver un équilibre entre matérialisme et idéalisme, entre instinct et ligne de conduite. Comme quoi la noble idée que l'on peut se faire du devoir accompli a des incompatibilités qui requièrent un travail sur soi. Je trouve ce texte vraiment très intéressant pour la réflexion sur laquelle il ouvre. A bientôt.
RépondreSupprimerEt oui, comme disait Platon, "ce qui est beau est difficile". Disons que le devoir a surtout l'avantage d'offrir un ligne de conduite un peu stable dans un monde où tout bouge tout le temps et dans tous les sens...
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