Lu la Vie de Démétrios de Plutarque. Je ne connais rien de plus contrasté que les vies de ces fameux généraux de l’Antiquité grecque, telles que Plutarque nous les a relatées. Les comportements les plus extrêmes, les vicissitudes les plus extraordinaires s’y succèdent à chaque page. Quelle personnalité frappante que ce Démétrios, fils du célèbre général d’Alexandre Antigone, et qui, si industrieux à la guerre, « s’abandonnait en temps de paix à des excès effrénés et profitait de son loisir pour se plonger sans contrainte et jusqu’à satiété dans tous les plaisirs ». Démétrios ne faisait pas les choses à moitié : « Il se donnait tout entier, nous dit Plutarque, tantôt aux voluptés, tantôt aux affaires, sans jamais mélanger les unes et les autres. » Et que penser d’Alcibiade, le célèbre élève de Socrate, à la fois révulsant et irrésistible, lequel, réputé pour ses frasques, « passait les journées entières dans la débauche et les plaisirs les plus criminels », puis, une fois passé dans le camp de Sparte, « se baignait dans l’eau froide, s’accommodait de pain d’orge et de brouet noir ».
Quelle époque fascinante que cette Antiquité grecque ! Combien toutes les choses semblaient s’y porter naturellement à leur paroxysme ! Combien nous semblons mesquins en comparaison de tels hommes, petits et timorés à la fois dans nos vices et dans nos actions d’éclat ! L’impudence portée à un tel degré d’outrance et affichée avec une telle candeur en acquiert presque le caractère de l’innocence.
Quelle époque fascinante que cette Antiquité grecque ! Combien toutes les choses semblaient s’y porter naturellement à leur paroxysme ! Combien nous semblons mesquins en comparaison de tels hommes, petits et timorés à la fois dans nos vices et dans nos actions d’éclat ! L’impudence portée à un tel degré d’outrance et affichée avec une telle candeur en acquiert presque le caractère de l’innocence.
Éh ben dis donc, cher Laconique ! Comment voulez-vous que je vous suive ? Vous enfilez les articles avec nonchalance, prodigalité et art littéraire ! De même que les lectures variées et intéressantes : biographie de Schwarzi, recueil d'aphorismes de Bouddha, roman du XIXème siècle avec Constant, roman du XXème siècle avec Sagan, thriller de gare contemporain, etc... Autant dire que vous êtes éclectique, cher Laconique ! Mais je me répète, puisque je vous en fais le compliment souvent à vos comtes-rendus...
RépondreSupprimerSachant que vous êtes un adepte de l'antiquité romaine et grecque, je ne suis pas surpris cette fois par le sujet de votre nouvel article, ni par le choix de Plutarque pour sustenter votre noble esprit. Je vous avoue d'ailleurs humblement que je me sens inculte dans ce domaine. Mais qui ne le serait en comparaison de vous, cher Laconique ? Beaucoup de vos innombrables lecteurs doivent se faire la même réflexion que Le Marginal Magnifique... En tout cas, sachez que je souhaite depuis longtemps m'attaquer à ces "Vies parallèles des hommes illustres", ça me titille, on sent qu'il y a de la puissance ; malheureusement, jusqu'à présent le temps mais surtout le courage me manquent.
Quel dommage ! Car, par exemple, ce Démétrios, "qui ne faisait pas les choses à moitié", m'est bien sympathique. De l'authenticité, de l'excès dans la débauche ou dans la vertu, mais au diable la tiédeur ! Il n'y assurément que de grandes âmes pour ne pas concevoir la modération et se jeter corps et âme dans ce qu'il entreprennent, et tant pis si c'est dans la fange. Bouh, la mesquinerie, quelle vilain mot ! Pourtant, effectivement, aujourd'hui celle-ci règne...
Il y a de la grandeur dans l'excès, de la "noblesse" dans le "paroxysme".
* 'ilS entreprennent, et tant pis si c'est dans la fange. Bouh, la mesquinerie, QUEL vilain mot
RépondreSupprimerCher Laconique, je ne pouvais laisser de telles horreurs impunies ! La fatigue, cher Laconique, la fatigue, la lutte m'épuise....
Eh oui cher Marginal, j’essaie de varier mes sujets, sans renier pour autant ma personnalité. Je ne fais en cela que suivre le chemin indiqué par Le Marginal Magnifique, qui alterne poèmes intimistes, militantisme fervent, références à la culture cinématographique et populaire, professions de foi anarchistes, etc. Au premier coup d’œil, tout cela est un peu disparate, pour vous comme pour moi, mais c’est ce que l’on recherche au fond : faire émerger une personnalité authentique des multiples facettes de nos engagements et de nos centres d’intérêt. En tout cas vous avez l’art de la périphrase pour résumer mes textes, votre esprit est toujours très souple malgré vos petites pertes d’attention, bien vite rectifiées d’ailleurs.
RépondreSupprimerOui, vous le savez, je suis fan absolu de Plutarque, il m’a réconcilié avec la culture livresque à une époque où, à force de lire du Nietzsche et des auteurs universitaires, j’avais perdu toute confiance en la capacité des livres à proposer un but clair et accessible à l’existence. Là, avec Plutarque, c’est simple et droit : il aime l’honnêteté, la tempérance, la bravoure, les actions utiles et nobles. Je lui avais d’ailleurs rendu un (trop) long hommage il y a un an. Et puis, comme vous l’avez décelé, il y a toutes sortes de contrastes chez Plutarque, tous les caractères : l’ambitieux, le cruel, le dépravé, l’homme probe, etc. Toutes les classes sociales et toutes les attitudes face à la vie. Je ne suis d’ailleurs pas le seul à avoir cédé à son charme, puisqu’il a inspiré Montaigne, Shakespeare (« Coriolan », « Jules César »), Corneille, Racine, Rousseau, et aussi le cinéma (avec le monumental « Cléopâtre » de Mankiewicz qui reprend des passages entiers de Plutarque). Je ne peux donc que vous encourager à le lire un jour, même si, il faut bien le reconnaître, il y a des passages plus rébarbatifs que d’autres.
Dès que je parle de Plutarque je me laisse emporter… Mais, cela ne vous a pas échappé, cher Marginal, j’ai surtout voulu témoigner de mon intérêt pour ces caractères bien trempés qui foisonnaient durant l’Antiquité, et dont nous chercherions en vain des équivalents de nos jours. Cela vaut mieux la plupart du temps, mais si nous échappons au pire, nous y perdons aussi l’occasion de quelques actions d’éclat… Mais ne nous alarmons pas trop : les âmes d’artistes, les poètes, ceux qui aspirent à une certaine philosophie conservent toujours une authenticité que les dirigeants et les hommes d’affaire ont perdue…
Des vies gérées à l'instinct où grandeur et décadence se la jouent pour engendrer des destinées romanesques., à la noblesse lourde de failles, et de paradoxes. Ces "vies parallèles", c'est en fait toute la complexité de la nature humaine, entre la raison et les débordements, avec la quête éperdue du bien-être. Ne croyez-vous pas Laconique que c'est toujours d'actualité mais avec le naturel en moins car l'époque est à l'hypocrisie. Les héros de l'antiquité appartiennent à leur temps et la plume subtile de Plutarque les a mis en scène avec réalisme et lucidité témoignant d'une antiquité de tous les excès car sans préoccupation de conformisme de leur part. Et comme vous l'écrivez, l'impudence si innée dans l'outrance de certains comportements, en frisant l'inconscience a un parfum d'innocence. Bonne journée Laconique.
RépondreSupprimerOui, c’est bien ça, c’est la nature humaine, avec tous ses excès et ses débordements, que Plutarque nous livre dans ses biographies. C’est bien pour cela que Plutarque est un des piliers de « l’humanisme » de la renaissance. Alors, bien sûr, comme vous le dites, la nature humaine n’a pas changé, seule « l’hypocrisie » vient recouvrir de ses voiles ce qui auparavant se donnait libre cours. En fait, les hommes de pouvoir ont toujours été plus ou moins dépravés, il faut croire qu’on ne se mêle pas au train du monde impunément… Les sages ont toujours été plus ou moins retirés… Mais tout ce qui vient de l’Antiquité nous provient paré d’une aura de mystère et de poésie, qui fait qu’on est plus indulgent à l’égard de ces hommes ; lesquels, en outre, risquant réellement leur vie sur les champs de bataille, payant leurs choix de leur sueur et de leur sang, avaient peut-être droit à plus d’abandon lors de leurs moments de loisir. Sans compter la plume magistrale de Plutarque qui magnifie tout ça !
RépondreSupprimerBonne journée à vous.
C'est juste, ces hommes illustres avaient besoin de se défouler pour compenser la rudesse de leurs engagements et combats où ils jouaient leur vie. Ils étaient authentiques se laissant porter par leur nature entre nobles valeurs, sens du devoir et sombres penchants. Plutarque, dans leurs portraits, leur a offert la postérité en leur donnant toute leur dimension forte et fragile à la fois, en biographe éclairé et subtile d'une époque. Bonne journée.
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