Depuis
quelques semaines, je me suis replongé dans l’Odyssée d’Homère, moins
rébarbative, il faut bien le reconnaître, que l’Iliade. Arrivé à l’épisode où
Ulysse, délivré par Hermès, doit quitter la nymphe Calypso qui le retenait
prisonnier « dans son antre profond », afin de rejoindre Ithaque
et son épouse Pénélope, je lis le passage suivant : « Ils gagnèrent
le fond de la grotte profonde où, demeurés ensemble, ils se livrèrent au
plaisir. » (Odyssée, V, 226). Admirable ingénuité du poète grec !
Rien de plus naturel pour Ulysse, avant de quitter sa geôlière, que de
rentabiliser de la meilleure façon possible leur dernière nuit commune.
Quels récits déroutants que ceux d’Homère ! Les lois morales traditionnelles ne semblent pas y avoir cours, les héros homériques obéissent à leurs propres règles, à leur propre morale. De retour chez lui, Ulysse massacre les prétendants de son épouse. En commettant l’adultère, puis le meurtre, il viole les commandements majeurs du monothéisme judéo-chrétien ; dans le cours du poème, il transgresse les cinq interdits fondamentaux du bouddhisme (« Tuer, mentir, voler, prendre la femme d’autrui, s’adonner aux boissons qui enivrent, c’est attenter dès ce monde aux racines mêmes de son être », Dhammapada, 246). Et que dire de son idéal ? Son but suprême est d’une trivialité déconcertante : alors que l’immortalité lui est offerte, il n’aspire qu’à retrouver son rocher natal et sa fidèle épouse, en opposition frontale avec les préceptes du christianisme (« Qui aime son père ou sa mère, son fils ou sa fille plus que moi n’est pas digne de moi », Matthieu 10, 37) et du bouddhisme (« De l’affection naît la peine. De l’affection naît la crainte. Qui s’est libéré de l’affection ignore la peine. D’où lui viendrait la crainte ? », Dhammapada, 213).
Il ne faudrait pas croire que c’est le réflexe d’une mentalité moderne que d’être froissé par de telles conduites. On connaît la célèbre critique de Platon dans La République, qui bannit les poètes de la cité et considère Homère comme un poison pour l’âme. Toute l’Antiquité languissait après un récit mythique qui aurait représenté, non plus la soumission de l’homme à ses affects, mais la victoire sur soi-même et l’orientation de l’âme vers son bien véritable. Après avoir représenté toutes les passions imaginables et leurs terribles conséquences, il était fatal, il était inévitable qu’émergeât un récit mythique représentant un héros maître de soi, chaste, détaché, juste, conforme en tous points aux attentes innées de la morale immémoriale. L’étincelle initiale s’est produite sous le principat de Tibère, sous l’administration de Ponce Pilate en Judée. Mais elle se serait de toute façon déclenchée, quelques années plus tôt ou quelques années plus tard, car la logique même des textes l’appelait. Rien n’est donc plus faux que cette assertion de Nietzsche selon laquelle le christianisme serait une « calamité » qui nous aurait « frustrés de l’héritage du génie antique » (Antéchrist, 60). Le christianisme est le récit final du monde antique, celui dans lequel toutes ses aspirations se rencontrent et se résolvent, celui dans lequel les mouvements erratiques de l’âme en peine s’achèvent pour aboutir à l’immobilité d’une victoire longtemps désirée.
Quels récits déroutants que ceux d’Homère ! Les lois morales traditionnelles ne semblent pas y avoir cours, les héros homériques obéissent à leurs propres règles, à leur propre morale. De retour chez lui, Ulysse massacre les prétendants de son épouse. En commettant l’adultère, puis le meurtre, il viole les commandements majeurs du monothéisme judéo-chrétien ; dans le cours du poème, il transgresse les cinq interdits fondamentaux du bouddhisme (« Tuer, mentir, voler, prendre la femme d’autrui, s’adonner aux boissons qui enivrent, c’est attenter dès ce monde aux racines mêmes de son être », Dhammapada, 246). Et que dire de son idéal ? Son but suprême est d’une trivialité déconcertante : alors que l’immortalité lui est offerte, il n’aspire qu’à retrouver son rocher natal et sa fidèle épouse, en opposition frontale avec les préceptes du christianisme (« Qui aime son père ou sa mère, son fils ou sa fille plus que moi n’est pas digne de moi », Matthieu 10, 37) et du bouddhisme (« De l’affection naît la peine. De l’affection naît la crainte. Qui s’est libéré de l’affection ignore la peine. D’où lui viendrait la crainte ? », Dhammapada, 213).
Il ne faudrait pas croire que c’est le réflexe d’une mentalité moderne que d’être froissé par de telles conduites. On connaît la célèbre critique de Platon dans La République, qui bannit les poètes de la cité et considère Homère comme un poison pour l’âme. Toute l’Antiquité languissait après un récit mythique qui aurait représenté, non plus la soumission de l’homme à ses affects, mais la victoire sur soi-même et l’orientation de l’âme vers son bien véritable. Après avoir représenté toutes les passions imaginables et leurs terribles conséquences, il était fatal, il était inévitable qu’émergeât un récit mythique représentant un héros maître de soi, chaste, détaché, juste, conforme en tous points aux attentes innées de la morale immémoriale. L’étincelle initiale s’est produite sous le principat de Tibère, sous l’administration de Ponce Pilate en Judée. Mais elle se serait de toute façon déclenchée, quelques années plus tôt ou quelques années plus tard, car la logique même des textes l’appelait. Rien n’est donc plus faux que cette assertion de Nietzsche selon laquelle le christianisme serait une « calamité » qui nous aurait « frustrés de l’héritage du génie antique » (Antéchrist, 60). Le christianisme est le récit final du monde antique, celui dans lequel toutes ses aspirations se rencontrent et se résolvent, celui dans lequel les mouvements erratiques de l’âme en peine s’achèvent pour aboutir à l’immobilité d’une victoire longtemps désirée.
Il est intéressant, votre nouvel article, cher Laconique ! Érudit et brillant comme à chaque fois, et peut-être encore plus pointu que d'habitude. Quelle richesse ! Vous laissez vos innombrables lecteurs sur le cul... Partant de votre lecture de "L'Odyssée" et des considérations qu'elle vous évoque au sujet de la "conduite" d'Ulysse, vous prenez de la hauteur et la mettez en perspective avec l'avènement du Christianisme que vous présentez comme une conséquence logique des textes de l'Antiquité. Enfin, j'essaie de résumer plus ou moins votre thèse, ce qui n'est pas évident, en plus d'être forcément réducteur, car, comme je le disais plus haut, votre analyse est d'une richesse infinie, tant vous jetez des pistes à tout bout de champ, et il y aurait beaucoup à dire.
RépondreSupprimerMoi aussi j'ai toujours été étonné de la liberté morale d'Ulysse, particulièrement dans l'épisode que vous citez avec Calypso, où "dans le fond de la grotte" ces deux salopards lubriques se "livrent au plaisir". Mais ça, c'est la cerise sur le gâteau ! N'oublions quand même pas que durant tout son séjour sur l'île de Calypso Ulysse baise la nymphe tranquillement à foison et sans en perdre une miette, jusqu'au dernier moment donc, tout en songeant amoureusement à Pénélope qui l'attend avec une fidélité et une abnégation totale. Et, à son retour à Ithaque, c'est avec autant d'"ingénuité" qu'il massacre ses prétendants sans vergogne ni l'ombre d'un remords !
Finalement, Homère nous représente un monde on ne peut plus sain, conditionné par l'action et dénué de toute culpabilité, avant que ne se ramène le christianisme avec sa notion de péché, ses tourments de l'âme et tous les emmerdements qui vont avec. Lisez donc Bernanos, vous me direz si on a gagné au change ! En ce sens, je comprends ce qu'a voulu dire Nietzsche, ou du moins je l'interprète à ma façon : le christianisme a tué dans l'œuf le modèle héroïque et hiératique antique pour le remplacer par un idéal des faibles, mesquin, un monde petit où règne la branlette du cerveau. Mais votre point de vue se tient, si l'on considère avec vous que "le christianisme est le récit final du monde antique", qu'il était "inévitable", qu'il s'inscrit dans sa logique comme son aboutissement suprême, au lieu d'être un accident de parcours.
Allez, franchement, cher Laconique, au fond, ne vaut-il pas mieux tremper le biscuit comme Ulysse et détruire ses ennemis sans se poser de questions ? Sur ce point, Ulysse est de la même trempe qu'un de vos héros, Conan le Barbare !
Eh cher Marginal, vous m’envoyez des fleurs, je suis touché, je n’en demandais pas tant, mais il faut toujours être prudent avec les compliments car, comme dit la Bible : « L’homme qui flatte son prochain tend un filet sous ses pas » (« Proverbes », 29, 5). En tout cas je vois que vous savez de quoi vous parlez, et que je n’ai pas été le seul à avoir été marqué par cet épisode de l’Odyssée. Dès que ça parle un peu de cul j’ai l’impression qu’on a tendance à être plus réceptifs !
SupprimerEn tout cas vous avez parfaitement résumé mon propos. J’ai toujours eu un peu de mal avec Homère. Alors que j’ai lu et relu Platon, Plutarque, les stoïciens, Euripide et les autres avec passion, j’ai toujours trouvé Homère un peu rebutant, et j’en suis venu à la conclusion que c’est précisément à cause du comportement aléatoire, imprévisible de ses héros. C’est ce qui fait son caractère étrange, mais aussi sa grandeur d’un certain côté. Comme vous le dites si bien (on sent que c’est le cœur qui parle), c’est « un monde conditionné par l’action et dénué de toute culpabilité », et l’Iliade davantage encore. Mais ce que j’avance, c’est que les aspirations morales de l’Occident n’ont pas été inoculées par le christianisme, elles sont immémoriales et universelles, comme l’indique la convergence entre les interdits bouddhistes et judéo-chrétiens. Mes réserves à l’égard d’Homère ne proviennent donc pas d’une mentalité « déformée » par le christianisme, elles expriment des tendances innées partagées également par Platon et par d’autres. Esthétiquement, Homère est superbe. Mais sur le plan du réel, de la vie vécue, le christianisme me semble plus proche du vrai. Mais bon, si j’adore parler de littérature, je préfère éviter de trop m’avancer sur les sujets religieux, qui est une thématique un peu pesante, il faut le reconnaître. Je dirais simplement que le christianisme, comme toutes les religions, n’est pas univoque, et que s’il peut favoriser la geignardise et l’auto-apitoiement, il a aussi une dimension ascétique, « hiératique » et « héroïque », et je dirais même que c’est cette dimension qui se manifeste prioritairement à mon avis dans les textes sacrés. C’est pourquoi un auteur chrétien comme Bernanos (qui m’intimide un peu, j’ai l’impression que ce n’est pas ce qu’il y a de plus frais comme littérature) ne peut prétendre représenter à lui seul l’esprit du christianisme.
Pour finir, vous me prenez par les sentiments en évoquant Conan le Barbare, qui, c’est incontestable, trempe son biscuit et massacre ses ennemis. Si en plus vous rajoutez la musique de Basil Poledouris en fond sonore, je crois que je serais prêt à le suivre jusqu’au fond de l’antre de Thulsa Doom à ce prix !
Hé bien, cher Laconique, je ne peux que louer votre érudition, à ma grande honte je n’ai encore jamais trouvé le temps de lire l’Odyssée dans le texte… Cela dit, vous semblez dire qu’Ulysse représente la « soumission de l’homme à ses affects », or c’est considérablement moins vrai le concernant que pour la plupart des héros grecs (Achille typiquement). Au contraire, Ulysse est le rusé, il possède une certaine sagesse et un sens de la mesure (cf l’épisode des sirènes). Non, si Ulysse avait été l’incarnation de l’hédonisme débauché, il eut été plus logique pour lui de rester éternellement auprès de Calypso (autrement plus sexy qu’une épouse vieillissante, n’est-ce-pas ?) Et j’ajoute qu’Homère n’attribue aucun viol à Ulysse durant la prise de Troie, à la différence d’autres chefs de guerre grecs.
RépondreSupprimerBon, je ne vais pas verser dans le nietzschéisme du Marginal, évidemment que l’ethos aristocratique d’Ulysse a des aspects choquants (sac de Troie, exécution des prétendants), mais globalement, ça reste un personnage plutôt humain et sympathique. Il renonce à Calypso (et à l’immortalité) par amour envers Pénélope (qu’il n’a pas vu depuis des années), ça parle à mon côté romantique. En tout ce n’est pas un idéal aussi trivial que vous semblez le dire, ça me paraît autrement plus admirable, ou en tout cas moins trompeur et désincarné, que la contemplation de l’Idée en soi…
Vous vous avancez un peu en affirmant que toute l’antiquité se languissait d’un héros « maître de soi », cher Laconique. Une partie des classes supérieures lettrées recherchaient peut-être quelque chose de ce genre, mais n’oubliez pas que Socrate avait certains traits du modèle « christique » que vous évoquez, et que ses contemporains ne l’ont pas adoré pour autant…Gare à l’apologétique et à la téléologie ! Le succès du christianisme n’est pas à chercher dans la littérature (moins d’1% de la population grecque ou romaine lisait Homère), mais dans la dynamique sociale de l’Empire romain…
Pour conclure je ne suis bien évident pas d’accord avec vous lorsque vous dites : « Le christianisme est le récit final du monde antique, celui dans lequel toutes ses aspirations se rencontrent et se résolvent ». Le christianisme a au mieux une parenté avec plusieurs points du stoïcisme (et encore, pas celui de Cicéron) et du platonisme. L’Antiquité tardive n’a pas reconnue dans la Croix sa vérité profonde, ça a été très moche cher Laconique, souvenez-nous de ce que les chrétiens ont subi, et aussi de ce qu’on subit les païens une fois devenus minoritaires. Aucune communion à chercher, mais plutôt une guerre civile (de religion) larvée (cf ce que dit St Augustin sur le sac de Rome par les barbares). Et Nietzsche n’a pas tort de persifler contre le fanatisme chrétien, regardez le peu qui nous reste des textes épicuriens, entres autres… Regardez la manière dont ils ont traité Hypatie ! Aucune réconciliation je vous dis.
Vous soulevez beaucoup de points dans votre propos, avec beaucoup d’érudition et de pertinence, cher Johnathan Razorback. Je vois que vous êtes familier avec la geste homérique. J’ai lu pour ma part L’Iliade aux deux tiers, et je compte finir cette lecture un jour ou l’autre, mais force est de reconnaître qu’il y a dans cet ouvrage de terribles tunnels, on perd le fil avec ces accumulations de massacres, décapitations, perforations, énucléations, démembrements, etc., j’avoue que l’intérêt s’estompe après quelques dizaines de victimes grecques ou troyennes. L’Odyssée est plus accessible et plus distrayante, plus variée aussi, et une fois qu’on a choisi sa traduction (celle de Philipe Jaccottet qui a longtemps fait référence me va tout à fait) ça se lit assez facilement.
SupprimerLe parallèle entre Achille et Ulysse est classique dès l’Antiquité. C’est l’objet d’un des tous premiers dialogues de Platon, l’ Hippias mineur, le débat tournant autour du mensonge, le franc Achille étant opposé au rusé et menteur Ulysse. La supériorité morale d’Ulysse sur Achille ne va donc pas de soi !
Vous déclarez, un peu péremptoirement mais c’est la loi du genre dans des débats de cet ordre, que l’idéal « romantique » d’Ulysse vous paraît « autrement plus admirable, ou en tout cas moins trompeur et désincarné, que la contemplation de l’Idée en soi ». Il est plus humain, certainement, et c’est pourquoi L’Odyssée a toujours fortement inspiré les hommes, jusqu’au dessin animé Ulysse 31 dans les années 80 (que vous êtes trop jeune, je ne l’ignore pas, pour avoir eu la chance de regarder). Mais pour juger un idéal, encore faut-il le comprendre. Il me semble que pour un platonicien authentique, c’est l’Idée qui est le réel, et le jeu des passions et des souffrances humaines (Platon emploie le terme générique de « ce qui est soumis au devenir ») qui est illusoire et vide de toute réalité. C’est un débat qui parcourt l’histoire de la pensée humaine, on ne peut pas le balayer d’un revers de main.
Je penche du côté de l’apologétique, et plus encore du côté de la téléologie, j’assume ! Et si Socrate a produit des réactions si passionnées chez ses contemporains, c’est bien que son entreprise de remettre le domaine moral au centre des spéculations philosophiques ne laissait pas indifférent. Il répondait à une attente sourde que ni Homère et les tragiques, ni les philosophes de la nature n’avaient su satisfaire. Quant aux raisons du succès du christianisme, il est incontestable qu’elles sont multiples, mais s’en tenir aux textes est une optique comme une autre, et très opérante à mon avis, c’est du moins ce que j’essaie de démontrer.
SupprimerC’est la raison pour laquelle, si je ne conteste nullement vos arguments irréfutables quant à l’hostilité sanglante entre le christianisme et le paganisme, je réponds tout simplement que cela se situe hors du champ de ma réflexion. A l’échelle des millénaires, le paganisme s’est effacé et a laissé la place au christianisme. La transition n’a pas été indolore, mais toutes les phases de transition sont douloureuses. En écrivant ceci, j’anticipe immédiatement ce que vous pourriez me rétorquer, et que vous m’avez déjà fort brillamment fait observer plus d’une fois, à savoir que le paganisme n’est jamais mort et qu’il revêt plusieurs formes qui se sont perpétuées à travers les âges. Certes, mais il faut bien adopter un point de vue pour écrire quoi que ce soit, et moi je suis dans le camp de « l’apologétique », dans cet article tout du moins. Par ailleurs un film est sorti récemment sur Hypathie, intitulé Agora. Film à gros budget et assez impressionnant visuellement, dans lequel les chrétiens sont représentés comme des talibans haineux et la bave aux lèvres. Difficile de ne pas verser dans l’excès d’un côté ou de l’autre dès qu’on aborde ce sujet, il faut croire…
@Laconique
Supprimer"A l’échelle des millénaires, le paganisme s’est effacé et a laissé la place au christianisme."
Certes, mais plutôt que de dire que le christianisme a réalisé les aspirations latentes des sociétés païennes, je trouverai beaucoup moins malhonnête de dire qu'il a forgé un nouvel type d'hommes (de subjectivités, comme diraient les foucaldiens). Et ce, dans une antiquité déjà bien avancée, où ces sociétés n'avaient déjà plus grande chose à voir avec leur période héroïque-archaïque (Homère, Romulus), ni politique (le Vème siècle grec av. J.C, la Rome républicaine). Le christianisme a triomphé sur fond de dépolitisation massive (un peu comme le bouddhisme "occidental" de nos jours, et peut-être aussi l'Islam), et pas vraiment parce qu'il aurait investi un domaine moral laissé vide (les philosophes de toute obédience l'avait déjà investi).
Par ailleurs, que le christianisme se soit imposé est un état de fait, un esprit aussi inactuel que vous ne devrait pas prendre appui sur cela pour essayer d'en tirer la preuve d'une supériorité de principe. Sauf à s'incliner devant ce qui est du seul fait que cela est, laissons cela au conformisme contemporain...
Pour moi, un magnifique livre d'aventures et une touchante histoire d'amour, puisque Ulysse, malgré ses dérives, n'a de de cesse de rejoindre sa fidèle Pénélope et son fils Télémaque. En fait Ulysse est un héros sans états d'âme, animé par une volonté farouche, qui malgré les tentations, tend vers son but suprême, retrouver son épouse et ses racines. Oui, c'est un personnage plutôt sympathique, avec ses côtés durs et tendre. Bonne journée.
RépondreSupprimerOui, vous avez raison, l’Odyssée est un récit qui nous parle à tous car on s’identifie facilement à Ulysse : nous avons tous des buts que nous cherchons à atteindre en dépit de l’adversité du sort, et Ulysse est un beau modèle d’endurance et de persévérance. Il ne perd jamais espoir, même dans les situations les plus critiques. Et sa liberté morale est rafraîchissante, car elle nous amène à nous interroger sur nos propres certitudes. Bonne journée à vous.
RépondreSupprimerPardon pour la faute d'inattention, le "s" oublié à tendre.Je voulais aussi vous dire, combien j'apprécie vos textes. Moi, qui croyais avoir beaucoup lu, ils me rendent bien humble. C'est très instructif, de lire vos observations et critiques sur les oeuvres, de même que celles de vos fidèles commentateurs, tels que Le Marginal ou Razorback qui sont très érudits. Cela permet d'approndir les lectures faites et de mieux connaître les auteurs. Je souhaite longue vie à votre richissime blog.
RépondreSupprimerMerci à vous, on fait ce qu’on peut, sans trop se prendre au sérieux, il faut que ça reste ludique. Et puis lire n’est pas un but en soi, il faut que ça apporte une vision originale et personnelle de la vie, une vision un peu plus riche que ce vers quoi les médias nous poussent. Je vais essayer de continuer à parler de littérature, mais je crains d’être contraint d’aborder d’autres sujets dans les temps qui viennent…
RépondreSupprimerJe ne fais que "passer" sur cet exigeant billet, cher Laconique, non pas que je ne l'aie pas apprécié, bien au contraire : il a nourri les modestes questions que je me posais déjà au sujet de l'articulation entre pensées antiques et pensée chrétienne (je me demandais justement si la seconde était la conséquence logique des premières, s'il y avait continuité ou rupture, etc.), de la même manière que vos échanges avec le Marginal et M. Razorback sont également très riches. Or, je ne donnerai aucun avis sur le sujet puisque je ne possède pas votre érudition à tous les trois (par ailleurs, je n'ai pas lu L'Odyssée). En tout cas, c'est un sujet vaste et sur lequel les divergences sont compréhensibles, l'essentiel étant néanmoins qu'il se trouve toujours des réflexions et des informations pertinentes dans chaque avis.
RépondreSupprimerComme vous le dites fort justement, chère miss Flint, la question de « l’articulation entre pensées antiques et pensée chrétienne » est un vaste sujet, que je ne prétends nullement épuiser ici. Comme pour toutes les questions de civilisation, il faut se méfier des réponses tranchées. Je me souviens avoir au début de l’année un ouvrage intitulé Christianisme et hellénisme, d’Arthur Darby Nock, selon lequel le christianisme s’est développé à peu près indépendamment des influences grecques. Selon moi, la sensibilité de chacun joue un grand rôle là-dedans. Chacun se sent attiré par des univers particuliers, et parfois il peut y avoir des conjonctions. Mon univers, vous l’avez compris, est plutôt méditerranéen, alors le christianisme et Homère y cohabitent parfaitement, et j’ai tendance à chercher des résonnances, des échos, des réactions. Le vôtre est plus « dionysiaque » disons, plus riche que le mien sans doute, mais j’aime bien le dépouillement, la sévérité « attique ». En tout cas L’Odyssée aurait de quoi vous plaire, c’est une histoire de navigation, un périple à travers des zones exotiques et hostiles, c’est le premier roman d’aventures en quelque sorte.
RépondreSupprimerJe vous remercie pour la référence au livre du professeur Nock, cher Laconique.
SupprimerPour L'Odyssée, c'est à ma curiosité que je dois de ne l'avoir sans doute pas encore lue à ce jour. Disons que j'en avais déniché un exemplaire dans la bibliothèque familiale, lorsque j'avais 10 ou 11 ans. Et j'avais eu beau m'accrocher pendant plusieurs jours, j'avais fini par le fermer définitivement, pensant que je n'étais pas du tout à la hauteur pour le lire. J'admets que mes préjugés d'enfant sont restés tenaces, même un peu plus de quinze ans après... Pourtant, l'ouvrage appartenait à ma mère, qui avait dû en lire tout ou partie lorsqu'elle-même était en sixième. Signe que ce n'est pas trop tôt pour faire lire un tel formidable ouvrage à un enfant de cet âge-là. Cependant, vous relirez le titre du chant XXIV, et vous verrez que le titre de l'un de mes articles en est fortement inspiré.